Utopie, illusion, chimère – Appel à contribution pour la revue Italies
Utopie, illusion, chimère
Coordination : Perle Abbrugiati, Martin Ringot, Raffaele Ruggiero
Au temps des mondes virtuels, on tend à prendre pour la réalité ce qui ne l’est pas. Mais
c’est une tendance de toujours que de projeter sur le monde une réalité intérieure, qu’elle soit
celle de l’espoir (politique), du rêve (affectif), ou du leurre (psychologique). Au réel, on opposera alors les dimensions utopique, poétique ou névrotique, et l’on voit bien que ces sphères permettent d’aborder tous les siècles, en littérature et en civilisation, sans oublier la dimension linguistique, qui avec ses lapsus, néologismes, jeux de mots, hybridations, crée des prolongements à la langue par une langue d’abord irréelle : sabirs, poésie et novlangue sont peut-être les projections de l’utopie, de l’illusion, de la chimère, sur le plan verbal. Enfin, les créations multimédiales de l’époque récente sont peut-être des châteaux de rêves croisés où ces trois dimensions se rencontrent.
On examinera les domaines suivants :
Utopie
Dans la création de mondes inexistants, le projet politique et le rêve se rencontrent. C’est
vrai aussi de prismes par lesquels on présente le monde réel. On examinera :
– Comment l’utopie essaie d’inventer un nouveau lien social avec une charge de projet
– Comment elle rend compte d’un lien social qui a changé, en lui donnant une torsion dans
une dimension onirique
– Comment le discours politique dénonce les illusions politiques tout en n’étant pas étrangers
à la notion d’utopie
– Comment le discours politique crée une illusion collective, un leurre par la propagande
Illusion
On voit que la notion n’est pas étrangère à la pensée politique, mais elle se déploie aussi sur
le versant artistique et sur le versant philosophique
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– La notion d’illusion est centrale en poésie. Elle est à la fois un mécanisme et un thème.
On envisagera à la fois les formes d’idéalisation que comporte la poésie ancienne, et plus
récemment l’illusion romantique, ou les formes de la modernité qui ont un lien avec
l’irréel.
– En art évidemment on pourra privilégier la notion d’illusion d’optique, mais sont concernées
aussi les méthodes de représentation qui magnifient le réel ou essaient de lui échapper.
– La notion d’illusion a bien sûr un retentissement philosophique. De Vico à Gramsci, en
passant par Leopardi, on peut suivre le sens qu’a le mot dans diverses formes de pensée.
Chimère
Au-delà du message qu’on essaie de loger dans les formes artistiques, toutes les formes
d’art sont des périmètres où se logent les « monstres » merveilleux ou cauchemardesques qui naissent
de notre psyché tourmentée ou créatrice. Sans entrer dans le domaine de l’analyse introspective,
on s’intéressera aux formes impensables :
– Personnages hybrides
– Langues improbables
– Idées folles (aux deux sens du terme)
Intermédialité
Une forme particulière de chimère est peut-être liée aux vecteurs intermédiaux, particulièrement
propices à abriter l’illusion et à héberger l’utopie :
– Mondes impossibles : L’émergence du transmédia et de la transfictionnalité (R. Saint-
Gelais) a encouragé la création de mondes fictionnels qui dépassent largement les modalités
de représentation. Traversant les media qui les disent, organisant les conditions de leur
propre exploration, ces mondes vivent et évoluent comme autant d’utopies parallèles,
voire persistantes (mondes en lignes, jeux massivement multijoueurs)
– Chimères narratives : de la nouvelle chimère de la « narration interactive » à la résurgence
vivace de créatures monstrueuses du passé, les chimères peuplent ces mondes impossibles
– Chansons, opéras, films, jeux video où l’illusoire a une place centrale et propose un retour
à son sens étymologique (in-lusio). L’illusoire intermédial invite à entrer dans le jeu, musical,
théâtral ou numérique. Un illusoire accepté et recherché par des récepteurs avides de
« feintise ludique partagée » (J.-M. Schaeffer).
Les propositions de contribution (500 caractères, espaces comprises) sont à envoyer avant
le 31 mai 2019 à l’adresse caer-italies-utopie@univ-amu.fr, accompagnées d’un bref paragraphe indiquant le statut de l’auteur de la proposition. Les réponses seront envoyées avant le 30 juin 2019 et les contributions seront envoyées avant le 27 septembre 2019.
La publication est prévue dans le numéro de la revue Italies du dernier trimestre 2020.